Etude Scientifique
FeelU Etudes #2 Donovan Morel Avantages et contraintes de la VR psychologue patient

L’avis du Psy #2 : Avantages et contraintes de la réalité virtuelle comme outil thérapeutique pour le psychologue et le patient

🕵 Le principal intérêt de la réalité virtuelle est qu’elle permet un sentiment d’évasion lorsqu’il n’est pas possible pour le patient de pouvoir quitter son institution. Ce sentiment d’évasion permet à la personne d’avoir le sentiment de sortir de son quotidien tout en restant dans un milieu sécurisé. Dès lors, la réalité virtuelle permet un champ très vaste d’application tant au niveau de l’évaluation de la personne qu’au niveau thérapeutique.

 L’immersion du patient dans un environnement virtuel proche de la réalité permet d’avoir une vision différente de ces réactions, de ses interactions et de son fonctionnement psychique et cognitif. Il est plus écologique et plus proche de ce qu’il pourra faire en réalité et la façon dont il réagira face à une situation similaire. 

La réalité virtuelle offre un véritable avantage dans l’évaluation et la rééducation de la mémoire épisodique. En effet, elle permet au patient d’être dans une situation d’encodage spécifique (Abichou, La Corte et Piolino, 2017) : il réalise une action dans un endroit précis et a un moment spécifique. Cela permet de créer des associations au niveau contextuel en créant un contexte initial. Le praticien, en ayant accès à ce type d’environnement pourra travailler la mémoire épisodique et la conscience autonoétique (voyager mentalement dans le temps pour revivre un souvenir d’un événement vécu dans son contexte, Becquet, Eustache et Quinette, 2020), du patient. Cela permet également au patient de vivre un phénomène de reviviscence grâce à la simulation d’environnement connu (par exemple, visite d’une ville précise, reportage sur un métier vécu). 

L’apport de la réalité virtuelle est double selon Le Gall et al. (2008) : elle permet la création de nouvelles situations de test et de réentrainement, mais également l’acquisition de connaissances sur l’organisation et le fonctionnement cognitif du patient et ses interactions. L’outil de réalité virtuelle est une technologie qui est à la fois personnalisable et flexible (Plancher et al., 2010). L’environnement virtuel peut être créé en fonction des besoins de la personne, il peut s’adapter aux envies et aux difficultés de chacun. 

L’utilisation de cet outil permet de garder le patient dans un milieu sécurisé. Par rapport à une situation réelle, la situation in virtuo (en réalité virtuelle) est faite de manière contrôlée et sécurisée, en prenant en compte les différents facteurs externes présents.  De plus, l’anonymat du patient est préservé contrairement à une situation in vivo (en dehors de la structure) où il peut être vu par des proches au côté d’un professionnel de santé. 

La littérature scientifique rapporte également un plus grand engagement de la personne et une plus grande motivation des patients dans le processus thérapeutique. Elle permet une meilleure adhésion des patients, notamment par rapport à d’autres outils. Par exemple, selon Garcia-Palacios et al. (2007) dans une cohorte de 150 patients recrutés dans le cadre d’une prise en soin pour phobie spécifique, seulement 3% des patients refusaient un traitement in virtuo, tandis que 27% des patients refusaient un traitement par exposition in vivo tel que la Thérapie Cognitivo-Comportementale (T.C.C.). Dès lors, la réalité virtuelle semble être un outil attractif, qui permet une motivation et un engagement plus important des patients. 

Il existe certains inconvénients à l’utilisation de la réalité virtuelle. Le principal inconvénient correspond aux effets secondaires qu’elle peut provoquer chez certaines personnes, à savoir le cybersickness (ou cinétose) également appelé « maladie de la réalité virtuelle » (Smith, 2019). Il s’agit d’une réponse physiologique qui est provoquée par le conflit entre trois systèmes sensoriels : le système vestibulaire, le système visuel et le système proprioceptif (Stanney, Kennedy et Kingdon, 2002). 

Le système vestibulaire correspond au sens de l’équilibre (Graf et Klam, 2006). La stimulation du système vestibulaire peut provoquer plusieurs comportements (Virre, 1996) tels que la stabilisation du regard. Autrement dit, lorsque la tête fait un mouvement, celui-ci est capté par le système vestibulaire qui transmet l’information au système visuel (oculo-moteur). Lors d’une immersion en réalité virtuelle, il existe un léger décalage entre le déplacement perçu et l’information visuelle transmise par le dispositif virtuel, ce décalage peut causer des nausées où encore une désorientation.  

Le système visuel correspond aux systèmes oculaires. L’être humain possède une vision binoculaire qui lui permet une vision stéréoscopique qui nécessite une coordination des yeux et une convergence, ce phénomène de vergence n’est plus affecté dès lors qu’un objet se trouve à moins de trois mètres de l’individu (Grall, 1997). 

Enfin, le système proprioceptif qui est en lien direct avec le contrôle moteur. Il fait notamment le lien entre la volonté de faire un mouvement et le mouvement en tant que tel (Longuet et al., 2014). Au sein d’un environnement virtuel, le corps doit s’adapter et faire un réajustement au niveau sensori-moteur et ceci pouvant être également la cause d’effets secondaires. 

Le cybersickness serait donc la résultante d’un conflit entre ces systèmes. Il apparait dès lors qu’il existe un décalage entre ce que perçoivent l’œil et le système vestibulaire. Kennedy et al. (1993) divisent les effets secondaires en trois catégories distinctes : les problèmes oculaires (maux de tête), une désorientation (vertige) et les nausées (vomissements). 

Les différents avantages et inconvénients de l’utilisation de la réalité virtuelle pour le praticien et pour le patient peuvent se résumer dans le tableau ci-dessous : 

Tableau 1. Avantages et Inconvénients de la Réalité Virtuelle

AvantagesContraintes
Plus grande motivation des patients
Réduction de l’influence du praticien sur le patient
Collecte des données plus facile 
Thérapie plus écologique (le patient est en situation réelle)
Evaluation plus écologique
Diminution des coûts en matériels
Diminution du coût temporel
Accessibilité du matériel Autonomie du patient
Observation clinique et comportementale
Sécurité du patient et préservation de son anonymat 
Possibilité de problème informatique 
Les résultats ne témoignent de tous les déficits apparents dans le cadre de l’évaluation (le patient peut être plus à l’aise avec un agent virtuel) 
Cybersickness 

Références bibliographiques : 

Abichou, K., La Corte, V., et Piolino, P. (2017). Does virtual reality have a future for the study of episodic memory in aging? Gériatrie et Psychologie Neuropsychiatrie du Viellissement, 15(1), 65-74. https://doi.org/10.1684/pnv.2016.0648

Becquet, C., Eustache, F. et Quinette, P. (2020). Etudier la conscience en neuropsychologie : utiliser la polysémie du concept pour définir les processus conscients. Revue de neuropsychologie, 12, 308-317. https://doi.org/10.1684/nrp.2020.0592 

Garcia-Palacios, A., Botella, C., Hoffman, H., et Fabregat, S. (2007). Comparing Acceptance and Refusal Rates of Virtual Reality Exposure vs. In Vivo Exposure by Patients with Specific Phobias. CyberPsychology & Behavior, 10(5), 722-724. https://doi.org/10.1089/cpb.2007.9962

Graf, W., et Klam, F. (2006). Le système vestibulaire : Anatomie fonctionnelle et comparée, évolution et développement. Comptes Rendus Palevol, 5(3-4), 637-655. https://doi.org/10.1016/j.crpv.2005.12.009

Grall, Y. (1997). La fonction visuelle. Le traitement du signal et ses applications. https://doi.org/10.51257/a-v1-e5175

Kennedy, R. S., Lane, N. E., Berbaum, K. S., et Lilienthal, M. G. (1993). Simulator Sickness Questionnaire : An Enhanced Method for Quantifying Simulator Sickness. The International Journal of Aviation Psychology, 3(3), 203-220. https://doi.org/10.1207/s15327108ijap0303_3

Le Gall, D., Besnard, J., Richard, P., et Allain, P. (2008). Utilisation de la Réalité Virtuelle en Neuropsychologie clinique. 7(4), 152-155.

Longuet, S., Jousset, F., Sédillot, M., Gossard, C., et Vernazza-Martin, S. (2014). Vieillissement du système proprioceptif et contrôle du centre de gravité. Neurophysiologie Clinique/Clinical Neurophysiology, 44(5), 498-499. https://doi.org/10.1016/j.neucli.2014.09.022

Plancher, G., Gyselinck, V., Nicolas, S., et Piolino, P. (2010). Age effect on components of episodic memory and feature binding : A virtual reality study. Neuropsychology, 24(3), 379-390. https://doi.org/10.1037/a0018680

Smith, S. A. (2019). Virtual reality in episodic memory research : A review. Psychonomic Bulletin & Review, 26(4), 1213-1237. https://doi.org/10.3758/s13423-019-01605-w

Stanney, K., Kennedy, R. S., et Kingond, K. (2002). Handbook of virtual environments : Design, implementation, and applications. CRC Press.Virre, E. (1996). Virtual reality and the vestibular apparatus. IEEE Engineering in Medicine and Biology Magazine, 15(2), 41-43, 69. https://doi.org/10.1109/51.486717